Bâton de l’homme saoûl

Des appuis dans le déséquilibre

Je voudrais noter quelques points techniques à ce sujet, car cette approche, en bâton français, est peu connue (et l’occasion fait le larron).

Alors, oui, nous n’avons rien inventé (je le précise) et je sais très bien qu’il existe de nombreuses disciplines de combat qui ont une approche identique (boxe de l’homme ivre par exemple, pour ne parler que de l’extraordinaire approche chinoise de ce sujet). Plus modestement, ici nous parlons de bâton français pratiqué « comme si » le (ou la) bâtonniste était saoul (e).

En bâton (comme en canne d’ailleurs), nous avons l’habitude d’enseigner majoritairement des déplacements sans croisement de pieds. Ici, nous travaillons essentiellement les croisements de pieds ! Le but étant de trouver des déséquilibres issus de croisements de pieds (pour aider le corps à « tomber »). Le bâtonniste doit ainsi chercher à utiliser l’inertie générée par le déséquilibre pour préparer un coup. Ce qui est assez compliqué (en dehors du fait de ne pas tomber vraiment) est de pouvoir utiliser des mouvements aléatoires pour armer correctement les coups. Car autant le déplacement doit paraître chaotique, autant les règles restent les mêmes : je dois armer mon coup avant de le développer. Ainsi, la distance de l’arme et le corps peut apporter une contrainte supplémentaire d’inertie (plus l’arme est tenue proche du corps, moins l’influence cinématique est importante > en terme de poids j’entends).

Le bâtonniste qui exécute cette « technique » doit littéralement chalouper tout en conservant sa maîtrise au niveau de la touche (et de la sécurité d’ailleurs). La touche doit se faire de manière extrêmement stable en respectant tous les critères de validité et d’équilibre du corps (ce point est essentiel). La technique de l’homme saoul, en bâton, permet donc de travailler relâchement extrême et précision du geste (et du corps). Cela demande beaucoup d’énergie et c’est un travail assez fatigant (nerveusement et physiquement). Mais, de mon point de vue, c’est une des approches les plus difficiles à exécuter en bâton français, que l’on soit débutant ou plus expérimenté.

 

Frédéric Morin

Professeur canne de combat et bâton français